La crise sanitaire a profondément transformé notre rapport au travail, en démocratisant notamment le principe, jusque-là mésestimé, du travail à distance. Si le télétravail reste réservé à certains types de professions, il représente pour ceux qui en bénéficient un confort et un gain de temps inédit.
La pression sur les travailleurs reste forte néanmoins, et notamment sur les travailleurs chinois, pour qui il reste difficile de concilier vie professionnelle et vie personnelle. Et, notamment, de dégager du temps pour entretenir sa forme physique.
Les salariés des entreprises chinoises répondent à cette problématique en intégrant à leur journée de travail des courtes séances de remise en forme (cinq minutes environ), révèle le South China Morning Post. Celles-ci ont la particularité d’être réalisées directement au bureau et d’utiliser des objets du quotidien professionnel.
Le bureau, une salle de muscu qui s’ignore
Adieu poids, cordes à sauter, bandes lestées et haltères : les ordinateurs portables, dossiers et chaises de bureau s’imposent comme des nouveaux accessoires pour leur séance de gymnastique.
“Les employés de bureau chinois travaillent désormais leur musculation en soulevant leur panier-repas, ou s’essaient au yoga et au Pilates en enchaînant les postures sur leur chaise de bureau”, observe le quotidien chinois.
La pratique, surnommée “la séance d’entraînement de 5 minutes”, se répand sur les réseaux sociaux comme Xiaohongshu. Ici, une femme soulève des dossiers comme elle soulèverait des haltères. Là, une autre réunit plusieurs chaises de bureau, puis s’allonge dessus pour pratiquer une séance de yoga. Là encore, une employée attache des sacs de livraison de repas à sa taille pour ensuite aller les distribuer à ses collègues.’
L’un d’eux commente : ”Ma collègue se porte toujours volontaire pour apporter le déjeuner aux autres employés dans les étages supérieurs. Elle considère ces trajets comme une séance d’entraînement quotidien.”
Autre manière de concilier activité physique et vie professionnelle : aller au travail en courant. Chang, qui travaille comme rédactrice à Hangzhou dans la province du Zhejiang, explique sa démarche à Jiupai News. Elle se rend à la station de métro en courant, tout en portant son ordinateur portable. “Mon ordinateur est un peu lourd, alors j’ai l’impression de faire de la musculation.”
Plus encore qu’un exercice physique, la jeune femme voit dans sa démarche la possibilité d’économiser les frais d’inscription à la salle de sport. “J’ai peur de m’inscrire, de ne pas m’y tenir et de gaspiller mon argent. Alors que quelques minutes intégrées à mon agenda sont faciles à gérer. C’est la solution pour nous, les employés de bureau, qui faisons souvent des heures supplémentaires et avons peu de temps libre.”
La jeunesse chinoise face à la crise de l’emploi
Si la plupart des employés vantent l’effet bénéfique de ces courtes séances sur leur concentration et leur énergie, la réalité n’est pas rose pour autant. “Mon entraînement consiste à ramasser des paquets pour mon patron”, confie un internaute. Quand c’est lourd, je me dis que c’est un entraînement pour les bras.” De quoi s’enthousiasmer, vraiment ”?
Le rapport des Chinois au secteur du travail reste en tout cas plus problématique que jamais. Il y a quelques mois, la jeunesse chinoise protestait déjà contre ses mauvaises conditions de travail et ses salaires dérisoires en venant au bureau en pyjama. L’année dernière, une étude confirmait l’ampleur de la crise : un jeune travailleur sur cinq est actuellement sans emploi. Le problème est d’autant plus préoccupant qu’une partie de cette jeunesse trouve aujourd’hui refuge dans les jeux d’argent.