“Je gagne 180 000 dollars par mois grâce à des propriétés que je ne possède même pas”. C’est ce qu’affirme à ses 30 000 abonnés TikTok l’influenceuse l’Américaine Hailie Anderson, 21 ans. Sur ses réseaux sociaux, la jeune entrepreneuse fait l’éloge d’une pratique qu’elle affirme on ne peut plus lucrative : le “Airbnb arbitrage”, qui consiste à louer sur une période plus ou moins longue un logement puis à le sous-louer à la nuitée à un tarif supérieur afin de se dégager un revenu.
Des logements élégants et minimalistes
La jeune femme s’est lancée dans cette pratique il y a deux ans, après avoir vu des vidéos d’influenceurs sur le sujet, et a commencé par sous-louer trois appartement situés dans un même immeuble à Austin, au Texas. Hailie Anderson en a depuis fait son activité principale et prodigue à son tour des conseils sur le sujet via ses réseaux sociaux… mais aussi au travers de séances de coaching, conférences et cours payants, une autre source de revenus pour l’influenceuse.
Depuis la Floride, elle loue et s’occupe désormais d’une cinquantaine de logements à Salt Lake City, Austin et Nashville et répertoriés sur Airbnb. Celle-ci meuble et décore chaque appartement selon des critères bien précis — généralement des intérieurs blancs ou gris, élégants et minimalistes, précise Business Insider — et publie pour chaque location une annonce qu’elle estime la plus attractive possible. Hailie Anderson affirme payer environ 100 000 dollars de loyers chaque mois, mais réussir à se dégager un bénéfice allant jusqu’à 80 000 dollars en sous-louant ces logements sur Airbnb, Vrbo et Booking, selon le média américain.
Les nouveaux “magnats de l’immobilier” ?
La jeune entrepreneuse n’est pas la seule à s’être lancée dans ce business et à prodiguer ses conseils de sous-location sur les réseaux sociaux. Un TikToker de 25 ans, avec le pseudo @airbbnbmastery101, a intitulé une vidéo “Comment quitter votre emploi en 2024 et devenir riche” tandis qu’une autre, Inayah McMillan, affirme à Business Insider avoir gagné plus de 300 000 dollars en 2022. “Ils prétendent être un nouveau type de magnats de l’immobilier – des magnats qui règnent en maîtres sans même détenir un titre de propriété”, précise le média américain.
Mais est-ce légal ? Tout dépend des lois locales régissant les locations à court terme. En France, pour la sous-location d’un logement du secteur privé et loué vide, le site Service Public précise que “le locataire doit au préalable obtenir l’accord écrit du propriétaire sur le fait de sous-louer et le montant du loyer pour la sous-location.”
Si certains des entrepreneurs jouent la carte de la légalité et pratiquent leur activité avec l’accord des propriétaires des logements — avec un bail autorisant explicitement la sous-location —, d’autres le font en catimini. En juillet dernier, un influenceur du nom de Konrad Bicher était condamné par la justice après avoir sous-loué des appartements sans autorisation, rapporte Business Insider, qui précise : “les autorités affirment que Bicher n’a pas payé plus d’un million de dollars de loyer, mais a gagné plus d’un million de dollars en louant ces mêmes logements sur Airbnb et un autre marché de location à court terme.”
Une pratique en baisse depuis 2018
Le principal atout de cette pratique réside dans le fait que les coûts de démarrage sont bien inférieurs à ceux de l’achat d’un bien immobilier. “C’est toujours un excellent moyen d’entrer dans le secteur de la location à court terme”, explique Jamie Lane, économiste en chef et vice-président senior de l’analyse chez Air DNA, qui fournit des données sur les locations à court terme. De là à imaginer faire fortune grâce à cette pratique ? “Y a-t-il des gens qui gagnent beaucoup d’argent en faisant de l’arbitrage ? Absolument (…) Est-ce l’exception plutôt que la règle ? Probablement”, estime l’expert.
Airbnb n’ayant pas fourni de données sur le nombre d’hôtes concernés par cette pratique, il est aujourd’hui difficile d’estimer la fréquence et la popularité de la sous-location. Ni de mesurer son impact précis sur l’immobilier des villes concernées, dont les résidents peinent parfois à se loger au sein d’un marché déjà très tendu. “Il y a un moment où j’essaie de ne pas trop me sentir coupable. Mais aussi, chaque entreprise affecte négativement quelque chose dans le monde”, affirme elle Hailie Anderson.
Selon Jamie Lane, la tendance aurait globalement ralenti depuis 2018 : la pandémie de COVID-19 aurait notamment conduit certaines des plus grandes entreprises spécialisées dans ce domaine à fermer boutique. La question de l’impact de la crise du logement sur cette pratique serait elle aussi à étudier. Car comme l’explique Hailie Anderson : “J’ai commencé ça parce que je n’avais pas d’argent pour acheter une maison”. “Si je peux aider 700 personnes à ne pas avoir à travailler toute leur vie de 9 à 17 heures, alors pourquoi pas ?”, conclut-elle.